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7 février 2016 7 07 /02 /février /2016 00:23
Paul Lynch La Neige noire

Albin Michel, 300 pages, 2015

La famille Kane, américains d’adoption, irlandais d’origine, ont rejoint Le Donegal, terre de leurs ancêtres, pour s’y installer. Cela fait dix ans, et leur fils y a grandi. Nous sommes en 1945.

Un incendie s’est subitement déclaré dans l’étable ; Barnabas s’est précipité dedans sans réfléchir avec son serviteur qui paiera de sa vie son dévouement…

Les vaches sont toutes mortes et le paysage, pendant longtemps autour de la ferme, va être pénible à voir, un charnier… tandis que la petite famille sent l’odeur de brûlé, et voit des cendres partout répandues, jusqu’à l’hallucination…

« Les vaches se décomposent peu à peu là où la mort les a fauchées en silence, arrêtées dans des postures saugrenues où elle les a abandonnés, une rangée de côtes affleure sur un flanc, pareille à une large denture. Le festin des oiseaux. En les guettant depuis la fenêtre , elle se persuade que la nature est ainsi faite, voila tout, mais elle ne peut empêcher le poing de l’épouvante d’étreindre ses entrailles »

Barnabas sombre dans la dépression, bien qu’ils puissent encore s’en tirer en vendant quelques uns de leurs champs ; Il s’y refuse, se querelle avec sa femme qui ne comprend pas son obstination, se fâche avec le seul voisin qui leur voulait sincèrement du bien.

C’est que Barnabas soupçonne très vite que l’incendie doit être criminel. L’épreuve que constitue la perte du cheptel, et le décès du serviteur (décès dont Barnabas se sent un peu responsable, et dont quelques uns vont l’accuser) sera bien vite décuplée par la pensée qu’on leur en veut. Ils ne vont plus regarder les autres fermiers de la même façon.

Billy le fils a lui aussi ses raisons d’imaginer qu’on a mis le feu à l’étable, mais il se tait.

Un récit poignant ( et désespéré aussi, pas fait pour garder le moral...), servi par une écriture somptueuse, des dialogues d’une grande vérité, pour décrire la montée de l’angoisse chez ces trois êtres, la nature rude et belle , dont ils vont maintenant se méfier, l’escalade du soupçon, et l’impossibilité de distinguer clairement si les désastres qui se succèdent sont dus à des persécutions de la part de voisins ( et lesquels ?) , à la malchance ou encore à l’altération de leur jugement.

Devant l’attitude superstitieuse ou simplement menaçante de leur entourage, les Kane finissent par penser qu’ils ne sont pas réellement intégrés à ce pays, à ces façons de penser très archaïques, qui n'avaient pas cours dans le monde ouvrier urbain de la Nouvelle Angleterre.

Le silence de la ferme irradie sa malfaisance dans la maison, pèse de tout son poids sur les choses.

Les oiseaux se sont acharnés sur la carcasse, cueillant dans les orbites la gelée tendre des yeux...

« Eskra au salon, ses doigts courant doucement sur les touches du piano. Un morceau qu’elle a souvent répété, si délicat qu’elle craint de meurtrir la mélodie sous son toucher, de la faire voler en éclats. »

C'est un roman dont on a plaisir à citer des passages, une langue si bien travaillée, si bien traduite, qui sonne toujours juste, dans les descriptions comme dans les dialogues, mettant en valeur une galerie de personnages diversifiés.

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31 janvier 2016 7 31 /01 /janvier /2016 10:48

Sabine Wespieser, 249 pages.

Franz Huchel, 17 ans, quitte la province un endroit de hautes montagnes auprès d’un lac, l’Attersee, car l’ami de sa mère, qui les entretenaient tous les deux se noie dans ce beau et traître lac.

Franz va travailler à Vienne comme apprenti chez un ami de sa mère, le buraliste Otto Tresniek. Otto a perdu une jambe pendant la Grande Guerre, il vend toutes sortes de périodiques, ainsi que des cigarettes et des cigares de luxe, notamment les Hoyo de San Juan qui vont jouer un rôle dans cette affaire.

Nous sommes en 1937, à l’automne, et pendant que Franz se met à lire les journaux et se forme une conscience politique proche de celle de son patron, la peste brune progresse rapidement. Les juifs commencent à être sérieusement maltraités.

De temps à autre, un vieux monsieur vient acheter des cigares dans la boutique ; Otto Tresniek se sent honoré de cette fugace présence : c’est le professeur Freud « le docteur des fous « . La Bergasse se trouve à quelques rues de là. Curieux, Franz suit le professeur et lui adresse la parole : il voudrait lire tous ses livres ! Comment, s’étonne le professeur, n’as tu rien de mieux à faire que de lire les gros bouquins poussiéreux d’un vieux monsieur ? … tu es jeune, va prendre l’air, promène-toi, trouve-toi une fille...

C’est un roman d’apprentissage agréable à lire, aux descriptions soignées, parfois originales, qui permettent de visualiser rapidement les gens et les situations. Les oiseaux jouent un grand rôle. Des pigeons, des petits oiseaux un peu bizarres « qui amènent la peste ».

Les dialogues courts et amusants jurent avec la situation critique.

La rencontre de Franz et de Freud qui se prolonge en rendez-vous sur un banc est-elle vraisemblable ? Comment expliquer que ce très jeune homme soit d’emblée si attiré par un vieux monsieur « qui soigne les fous » alors que Franz se sent plutôt sain d’esprit ? Même si la suite montre qu’il ne l’est pas tant que cela ! Franz a beau être un jeune homme de la campagne, difficile de croire qu’il soit si naïf ; son comportement est plutôt suicidaire, à moins qu’il ne mésestime gravement l’ennemi.

Pas sûr non plus que les échanges eussent été d’emblée aussi décontractés entre Franz et ses interlocuteurs.

Les portraits de femmes sont très traditionnels : la mère aimante et qui sait conserver sa dignité, la pute sans foi ni loi, la vieille fille attachée à son père…ces portraits sont néanmoins tracés d’une plume délicate.

Mettre en scène un personnage illustre tel que Freud, n’est pas chose facile ! A sa place, je ne l'aurais pas nommé.Le jeune auteur a de l’ambition, il ne se refuse rien… de ce roman je retiendrais surtout les descriptions, et certains dialogues piquants.

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22 janvier 2016 5 22 /01 /janvier /2016 18:50

Gallimard, 2014, 408 pages.

Titre et parution originaux: NW, 2012

Au Nord ouest de Londres, il y a des quartiers chics et paisibles et d’autre plus bruyants et carrément défavorisés. Les héros du roman ont grandi dans une cité ouvrière et multiculturelle,la cité Caldwell, entre Willesden et Kilburn, où se côtoient des ethnies diverses.

Tous âgés de 35 ans au moins, certain de ces jeunes ont plus ou moins réussi leur ascension sociale, d’autres n’ont pas réussi à sortir de cet endroit problématique.

Nous suivons ainsi, par le biais du monologue intérieur, Leah, jeune irlandaise qui a réussi à obtenir un diplôme universitaire et se consacre à une organisation pour les défavorisés à la mairie. Son travail l’ennuie, mais elle est déterminée à faire du social utile. Mariée à Michel un coiffeur français, d’origine africaine. Ils sont toujours très proches, sauf qu’un gros différend les oppose : Leah ne veut pas d’enfant, Michel en rêve. Ignorant les désirs (ou plutôt non-désir) de sa femme, Michel croit qu’il y a un problème de stérilité…

Le couple vit dans un lotissement agréable, mais on voit la cité de la fenêtre de l’appartement.

Natalie s’appelait autrefois Keisha Blake. Elle a changé de nom, (dommage, Keisha c'est joli ... mais elle avait ses raisons, que vous apprendrez...) en même temps que de quartier : elle vit près du parc encore plus loin de la cité, avec Frank, et est devenue juriste. Le couple a deux jeunes enfants. Natalie et Leah continuent à se voir ; ensemble elles se plaisent encore, en groupe, elles s’ennuient mais s’accrochent. Elles ne sont pas très heureuses mais tiennent bon...

Félix a exercé divers emplois qu’il a toujours quittés et s’est récemment sevré de la drogue et même de l’alcool. Marié jeune et père, il ne voit plus cette famille, et s’est trouvé une énième maîtresse qui va le rendre heureux. Sauf qu’il n’a pas rompu avec d’anciennes « relations »…

Nathan plaisait beaucoup aux filles étant enfant, mais il a très mal tourné...

Des notations elliptiques, précises et réalistes, nous renseignent sur le personnage que l’on suit, qu’il pense, ce qui lui arrive. Nombreuses énumérations, phrases sans verbes, plongée dans une atmosphère, mais aussi dialogues brefs et longs, récits souvent logorrhéiques, où l’on doit deviner qui parle , qui s’adresse à qui, et où, à l’aide de pensées livrées tronquées, parfois ; à d’autres moments, la narration redevient classique.

Autant dire que depuis "De la beauté", Zadie Smith a évolué, plus ou moins changé de style s’orientant vers un récit relativement expérimental, mais très ancré dans la tradition anglaise (V Woolf par exemple a pu servir de modèle, mais aussi bien Joyce ). N’allez pas croire pour autant que le récit est vraiment difficile à suivre ! On est seulement déconcerté de temps à autre, et on reprend vite le fil. Les personnages sont très attachants.

Pour moi, c’est là encore une belle réussite.

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25 novembre 2015 3 25 /11 /novembre /2015 10:17
Julia Courtney-Sullivan les Débutantes ****

Titre original : Commencements ; 2009

2012 éditions rue Fromentin, 517 pages

Université Smith début des années 2000

Roman d’apprentissage de quatre filles de 18 ans qui viennent d’emménager à Smith une université américaine féminine du Nord.

Celia étudie la littérature pour devenir romancière, boit pas mal collectionne les coucheries d’une nuit ; Bree est une future avocate ; elle vient d’Atlanta et est déjà fiancée. Sally vient d’enterrer sa mère, et apprend la biologie espérant faire médecine après la fac ; April les sciences sociales pour travailler dans l’humanitaire. Végétalienne et féministe, elle s’occupe déjà de plusieurs associations pour venir en aide aux femmes maltraitées.

Côté sentimental, Sally la scientifique va avoir une relation assez suivie avec un prof…de poésie ; Celia n'a que des déboires. Bree fréquente une fille et sa famille ne veut pas le savoir. April travaille pour payer ses études ; elle aide Ronnie une féministe pure et dure à réaliser des films documentaires sur les abus sexuels faits aux femmes. Le job est dangereux.

Les 4 filles sont très liées les unes aux autres et les études achevées, le groupe se reforme en cas de crise… c’est admirable !

Elles sont également très attachées à leurs familles, à leurs mère surtout, April mise à part.

C’est un roman de mœurs agréable à lire. Pour les histoires d’amour l’auteur a su éviter les pièges de la sentimentalité facile et de la trop grande naïveté. Le côté préoccupations sociales est sérieusement traité. On s’attache aux jeunes filles. Pas de la littérature à proprement parler mais un récit intéressant, et bien mené.

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20 novembre 2015 5 20 /11 /novembre /2015 10:27

2011, 396 pages.

Hannah jeune fille de 18 ans, tout au nord de la Suède. Famille pauvre, la mère ne peut plus la garder. La confie à Jonathan Forsman qui a du bien, et ne lui fera pas de mal « car il est converti ». Hannan part pour la ville, devient servante de Joanthan, puis est admise sur un navire en partance pour l’Australie pour y être cuisinière. Forsman possède la chargement, et la protège encore ; de fait, elle ne se fait pas violer, mais rencontre un jeune marin timide et agréable. Ils se marient. Hélas, l’idylle dure peu car il attrape une fièvre mortelle.

Hannah est choquée, elle ne peut plus reste sur la navire, débarque clandestinement au Mozambique, dans le premier port où ‘s’arrête le navire. Elle s’installe dans un hôtel tout près du port. C’est un bordel mais d’abord elle n’en sait rien ! elle est malade, reste longtemps alitée, et là encore, on la protège ( son statut de blanche ainsi que sa forte personnalité …) car le bordel est tenu par un portugais Vaz qui fait travailler des Noires, et qui témoigne un grand respect à cette jeune femme seule qui vient d'arriver...

Ecrit simplement, bien structuré, ce roman ausculte le racisme anti-noir au début du 20eme siècle en Afrique, les tentatives de révolte des populations odieusement soumises, leurs stratégies de défense, les superstitions des blancs et celles des noirs.

Il m’a plu. C’est même le roman de Mankell que j’ai préféré.

L'héroïne a un côté " vierge intouchable" qui n'est peut-être pas tout à fait crédible... on doit imaginer que sa personnalité, quelque chose en elle force le respect... outre le fait qu'elle est blanche.

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6 novembre 2015 5 06 /11 /novembre /2015 12:11
Mathias Enard Boussole ****+

Actes Sud, 375 pages.

Un musicologue viennois ( de nos jours) insomniaque, Franz Ritter ( Ritter signifie chevalier c’est humoristique par rapport au personnage ) ; sa nuit : il n’arrive pas à dormir et craint d’être atteint d’une grave maladie ; pour se désennuyer il convoque ses souvenirs de voyages en compagnie notamment de Sarah une femme française dont il a toujours été amoureux ( mais ils n’ont vécu ensemble que de brefs moments)

Leurs rencontres en Styrie au château d’Hainfeld, en Egypte en Turquie, à Istanbul ; en Syrie à Palmyre ; en France à Saché le château de Balzac, où le narrateur franco-autrichien passait des vacances. À Paris …

Sarah est archéologue a fait une thèse sur les représentations orientales dans la culture française. Avec elle, il est parti sur les traces d’aventurières fascinantes : Marguerite Andurain, Anne-Marie Schwarzenbach, Jane Digby…

Il évoque aussi ses moments musicaux les plus passionnants, le voyage de Liszt à Constantinople où il joua pour le sultan. Il est abondamment question de Thomas Mann et du Dr Faustus ( je n’avais pas pensé à cette lecture depuis longtemps, je suis bien aise qu’on me la rappelle !).

Les relations culturelles fructueuses entre le proche orient et l’Europe (surtout la France et l’Autriche) sont le leitmotiv de ce roman ( pas tout à fait roman, recueils de promenades de réflexions et d’histoires) ; on apprend par exemple que sur le manuscrit original de la Peau de chagrin la sentence mortifère, gravée sur le talisman était écrite en arabe.

Ce recensements de propos et de récits, parfois amusant, ou tenant du roman d’aventures, quelquefois lyriques ( sans exagérer), nostalgiques souvent, liés toujours à un lieu géographique et à une femme ( ou un ancien ami) en même temps qu'à une référence culturelle, fait penser quelquefois à la manière de Pascal Quignard. Mais l’écriture est plus souple, jamais péremptoire, les tonalités variées, et l’humour est au rendez-vous.

Curieux de l’orient ( au temps d’une magnificence disparue) de la culture germanique, de la littérature française du 19 eme siècle, et de la musique romantique, baroque, et moderne, du parcours de quelques femmes exceptionnelles, ce livre est pour vous.

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31 octobre 2015 6 31 /10 /octobre /2015 12:29
Antoine Choplin Une forêt d’arbres creux

La Fosse aux ours, 2015, 116 pages.

En 1941, Le dessinateur Bedrich Fritta de Prague est déporté à Terezin( le camp de Theresienstadt) avec sa femme Johanna et son petit garçon. Dans un premier temps ils souffriront de la faim et du froid mais ne seront pas torturés. Bedrich doit passer ses journées à dessiner des plans pour l’agrandissement du sinistre domaine ; il partage l’atelier avec d’autres juifs tous spécialisés dans les arts graphiques.

La nuit, les dessinateurs reviennent en secret dans l’atelier et se remettent au travail pour mettre ne scène sur papier leur quotidien et celui des autres déportés. Les réalisations sont dissimulées derrière un mur. Elles sont destinées à servir de témoignage quant à la vie réelle dans le camp. Une vie que l’on nous décrit avec simplicité et précision, un récit qui émeut et terrorise aussi.

Le titre se réfère aux deux arbres que Bedrich aperçoit par delà les barbelés à son arrivée au camp. Des arbres qui ne cachent pas la forêt de supplices au-delà d’eux.

Deux arbres ( des ormes pense-t-il) qui sont beaux jeunes et luxuriants déjà mais dont l’entrelacement complexe et chaotiques des branches induit une sensation angoissante, suggère la souffrance de ceux qui vivent au-delà de ces arbres. Pou lui, ce ne sont pas de vrais arbres, il visualise « un gouffre … s’ouvrant à la base du tronc ». Le narrateur compare les fils de fer barbelés derrière les arbres, à une portée musicale inférant des sons discordants « Drôle de portée avec ses barres de mesure, vide de toute mélodie, et contre laquelle, à y bien regarder, semble se disloquer la promesse des choses ». Au cours du récit, il y aura effectivement un concert…

La métaphore est très juste, et ce prologue donne le ton de l’ensemble. Le style est magnifique, travaillé sans être surchargé, une poésie amère et vraie s’en dégage.

A lire, impérativement ! j’avais déjà remarqué cet auteur avec « le Héron de Guernica»

Les dessins de Bedrich Fritta ont été exposés au musée Juif de Berlin ; vous pouvez télécharger le fichier et en profiter. Son style de dessin me fait penser à Bruno Schulz…

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5 octobre 2015 1 05 /10 /octobre /2015 18:28
Laurent Binet La septième fonction du langage **

Grasset, 495 pages.

L’auteur imagine que Roland Barthes renversé par une camionnette et victime d’un traumatisme crânien qui lui fut fatal, a été victime d’un assassinat plutôt que d’un accident. Les conducteurs l’auraient heurté intentionnellement, et un individu de l’hôpital ( peut-être une infirmière ?)L’aurait achevé. Et pourquoi donc ? Il détenait un document important. Un document qui explique comment faire pour persuader d’une manière infaillible n’importe quel auditoire de faire n’importe quoi.

Vraiment ? Une telle recette peut-elle exister ? Non, bien sûr ! (Sauf dans la science fiction, on entre dans la pensée des gens par télépathie etc. vous avez lu des trucs de ce genre…)

Tout le monde le sait ! Le langage nous entraîne où il veut, et l’on n’a sur lui que peu de prises. Bien sûr on peut s’entraîner à l’art de persuader, au sophisme, et obtenir de brillants résultats dans les joutes oratoires… et on en lira quelques unes dans ce roman, qui tient de la satire ( bien lourde caricature de quelques intellectuels ) de la série policière, du roman d’aventure.

Bref un policier Bayard et un étudiant en sémiologie Simon mènent l’enquête. Simon est une sorte de Sherlock Holmes qui à observer les gens déduit immédiatement leur passé leur profession leur situation de famille leur niveau de vie etc.…

Ce roman grouille de clichés et cela saute aux yeux dès la première phrase : « la vie n’est pas un roman. C’est du moins ce que vous voudriez croire. Roland Barthes remonte la rue de Bièvre. Le plus grand critique littéraire du XXème siècle a toutes les raisons d’être angoissé au dernier degré. Sa mère est morte avec qui il entretenait des rapports très proustiens. «

Pourquoi ne pas dire simplement qu’il était très attaché à sa mère ? L’adjectif « proustien » est tellement tarte à la crème que cela me fait tiquer.

Personnellement je n’ai pas réussi à croire à cette histoire, je suis restée en dehors presque tout le temps. La façon dont l’auteur caricature Sollers, Kristeva, Foucauld, et Henri-Lévy est tellement appuyée que l’effet en est raté : je n’ai même pas souri ! Il y a beaucoup de pages où l’on subit les ébats sexuels extrêmement vulgaires de plusieurs personnages saisis du démon de midi-minuit, dans n’importe quelle position et dans les endroits les plus attendus comme les plus improbables un sauna, une photocopieuse, un cimetière, et que sais-je encore …

Seules m’ont plu les pages italiennes, notamment celles consacrées au carnaval de Venise, à certaine reconstitutions historiques, et dans une certaine mesure les joutes oratoires du club du Logos encore que les châtiments infligés aux perdants sont limite débiles !

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17 août 2015 1 17 /08 /août /2015 17:32
Iegor Gran La Revanche de Kevin***

POL, 2015, 189 pages

Un jeune homme, Kevin H. est complexé par son prénom qui semble-t-il est synonyme de médiocrité, basse extraction sociale, QI faible…

Il a tout de même réussi à être commercial et à vendre de l’espace publicitaire à la Radio. Il n’aime pas ses collègues animateurs, qui se prennent pour des gens intellectuels et cultivés et sont en fait prétentieux cupides et vulgaires. Ses collègues le méprisent et le tiennent pour la dernière roue du carrosse.

Kevin, au Salon du Livre se fait passer pour un lecteur de manuscrits appartenant à « la grande Maison ». Il feint de s’intéresser au texte de François –René Pradel, auteur publié dans des maisons honorables, mais n’obtenant qu’un succès d’estime. Bien sût Kevin se trouve un autre nom : Alexandre Janus-Smith. Janus parce qu’il a deux têtes, Alexandre parce que c’est tout un empire, Smith pour le contraste et le trait d’union. Très bon pseudo ! Belle faconde aussi, car Pradel le prend au sérieux. A travers une série d’échanges de mails, il parvient à lui faire croire que le comité de lecture de la Grande Maison s’intéresse à son texte et veut le lancer ! Bien sûr le poisson ferré Janus –Smith disparaît…

Pradel n’est pas sa première victime.

Mais ce nouveau succès, va donner à Kevin du fil à retordre …

Nous avons là une énième satire féroce des milieux de l’édition, et de la radio. L’auteur recherche la formule qui gifle, la métaphore rare, l’énoncé brillant ; la première partie m’a plu.

Pourtant, vers la page 70 (bien avant la 99, donc…) j’ai commencé à m’irriter des nombreux effets de manche que recèle le texte. Non que ce soit de l’humour facile… les phrases je l’ai dit sont plutôt recherchées et témoignent d’un vrai travail de style. Mais cette histoire sombre dans la dérision totale, et à cultiver la dérision, on peut tomber dans le dérisoire. Le fait est que rien n’est à sauver dans ce monde-là ! Tous pourris, tous vains, Kevin y compris. Le seul personnage que l’auteur semble apprécier c’est la maman de Charlotte. Pourtant ce personnage frise la caricature à cause de la surcharge stylistique.

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12 août 2015 3 12 /08 /août /2015 17:30
Thomas Hardy Loin de la foule déchaînée***

1ere parution 1874

LP, 2015, 470 pages.

Bathsheba une jeune fille de vingt ans, a hérité l’exploitation agricole de son oncle, à son décès ; elle en prend la direction et règne sur une équipe d’ouvriers, tous des hommes, avec célérité. Elle a une demoiselle de compagnie gentille et un peu sotte, cela lui suffit comme fréquentation féminine. Un jour sa ferme manque de périr dans un incendie ; Gabriel Oak, ex-fermier ruiné devenu journalier, sauve la propriété et entre à son service. Batsheba et Gabriel se connaissent déjà ; il en est amoureux mais elle l’a éconduit.

Le fermier voisin de la jeune fille, Boldwood est un célibataire endurci deux fois plus âgé qu’elle ; pour lui faire une farce, elle lui envoie une carte de St Valentin. Hélas ! Boldwood a pris la chose au sérieux et commence à lui faire une cour plus qu’assidue. Oak, sage pieux et travailleur, continue à l’aimer en silence. Cependant que Batsheba est attirée par le sergent Troy, bel homme, galant, et plus amusant que les deux soupirants précédemment cités.

Nous avons là une action plutôt lente inscrite dans une tradition bucolique ; la vie à la campagne, les travaux des champs, sont minutieusement décrits pour chaque saison. Des événements naturels tels qu’un gros orage, un incendie, les beautés de la nature ( aube, nuit, coucher de soleil, averse) font l’objet de peintures colorées.

On suit les bonnes et mauvaises fortunes de Batsheba aux prises avec ses amoureux : le vieux voisin dépressif et insistant, le trop sage Gabriel ennuyeux comme un bonnet de nuit, et le libertin intéressé et dispendieux… la pauvre jeune fille est bien mal lotie !

On la plaint… L’intrigue ne réserve pas de vraie surprise (on en devine facilement les grandes lignes). Le style est très soigné. les personnages sont bien campés, l’intrigue est parfaite,et… je me suis passablement ennuyée ! Il faut croire que je suis plus rat des villes que des champs…

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  • : Comptes rendus de mes lectures avec des aspects critiques + quelques films de fiction Récits de journées et d'expériences particulières Récits de fiction : nouvelles ; roman à épisodes ; parodies. mail de l'auteur : dominique-jeanne@neuf.fr
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