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14 avril 2006 5 14 /04 /avril /2006 17:31

Résumé des 1 et 2 : Guillaume ( 16 ans) vient d'emménager dans une chambre indépendante en juillet 69 et il y reçoit son ami Mathieu pour la première fois.

 

L’air terrifié, le corps tétanisé, il fit quelques pas au hasard, regardant sans les voir les murs, les objets divers, ou comme s’ils étaient autant de monstres.

Guillaume tourna la tête vers la fenêtre ouverte.
  Mathieu recula vers le mur le plus éloigné.Ne la ferme, pas, c'est inutile. Empêche-moi de le faire, tu en as la force, tu es plus grand que moi.

 

 

Guillaume avait déjà assisté à ces  crises. Au moment de traverser les rues, Mathieu craignait  les feux de signalisation. Le rouge. L’arrêt. Arrêt de toute chose. Tout s’arrête, il est hors du temps, il  crie et tremble bien après le retour au vert.

 

Il ressentait très durement le son traînant d'une mélodie sur le pick-up, les rythmes lents le jetaient aussi dans le hors-temps.

En cas de crise la présence de Guillaume évitait à son compagnon de s’adresser à n’importe qui. Mathieu le tirait par une manche, le secouait, disait son nom, énonçait des phrases intelligibles, recevait les réponses.

 

 

L’an dernier, Mathieu lui avait fait parvenir une lettre en classe, à la tombée de la nuit pendant un cours de mathématique où l’on corrigeait un devoir sur les identités remarquables. Guillaume s’en souvenait très bien parce que c’était remarquable qu’il eût compris cette leçon et obtenu une bonne note au contrôle. Le message de Mathieu, il en avait pris connaissance de fort bonne humeur, à cause de ce miracle ; un message qui était un cri de détresse, émaillé de plaintes confuses sur l’absurdité de l’existence et la cruauté d’autrui que Mathieu concluait par le constat que seule la beauté pouvait « nous » sauver et l’offre à Guillaume de s’enfuir tous les deux  dans une écriture tassée, serrée, résistant au déchiffrement.

 

Guillaume n’avait pas  condamné l’appel à la fugue, puérile mais attirante, ni relevé l’ambiguïté du message. Il n’avait rien trouvé d’autre qu’un « ça s ‘arrangera » d’une platitude incroyable mais prononcée sur un ton confiant et joyeux qui correspondait à son humeur de ce soir là.

 


Un lien s’était noué et une sorte de fatalité les poussait à discourir pendant des heures. L’événement des identités remarquables ne s’était pas reproduit, et de même la rencontre avec un être aussi atypique que Mathieu avait peu de chance de se répéter. Comme Mathieu ignorait les codes sociaux d’admission à une certaine normalité, Guillaume lui confiait presque tout ce qu’il n’aurait dit à personne de crainte de paraître ridicule.
En contrepartie, il offrait à Mathieu la chance d’avoir un interlocuteur.

 

Mathieu n’avait que Guillaume pour toute société et ce dernier en était fier tout autant qu’inquiet. Ses parents n’approuvaient guère cette fréquentation ; selon sa mère Mathieu était caractériel et autiste même s’il possédait le langage.

 

En son for(t?) intérieur, Guillaume pensait souvent et non sans une satisfaction morbide que Mathieu était son âme damnée.

 

Une éternité plus tard,  L'ami revint à lui. Il accepta du thé citron dans un verre à dent, et contempla le carnet de croquis que son ami lui montrait, sollicitant son avis avec une sorte d’inquiétude ; il n’y avait que des nus féminins. Mais Mathieu était prêt à s’intéresser à tout maintenant qu’il avait repris pied sur la terre ferme.

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